Le port du masque fait partie des mesures prises pour lutter contre le covid-19. Mais des publications soutiennent que le port prolongé du masque a un impact sur la santé. Nous avons vérifié.
Des propos qui circulent sur les réseaux sociaux, notamment whatsApp, affirment que « l’utilisation prolongée du masque provoque une hypoxie ». Ces publications ajoutent : « Respirer sans cesse l’air expiré se transforme en dioxyde de carbone, ce qui provoque des vertiges. Cela intoxique l’utilisateur et bien plus encore lorsqu’il doit se déplacer, effectuer des actions de déplacement. Cela provoque un malaise, une perte de réflexes et de conscience. Et génère une grande fatigue. En outre, le manque d’oxygène provoque une dégradation du glucose et une augmentation de l’acide lactique, qui est un danger. Certaines personnes qui conduisent leur voiture avec le masque est très dangereux, car l’air vicié peut faire perdre conscience au conducteur. Il est recommandé de ne l’utiliser que si vous avez quelqu’un devant ou très près de vous, et il est important de ne pas oublier de le soulever toutes les 10 minutes pour continuer à se sentir en bonne santé. Il est contre-productif pour les personnes qui servent le public pendant 8 heures, car elles s’intoxiquent sans le savoir ».
Avant de circuler sur les réseaux sociaux notamment en Côte d’Ivoire, ces affirmationsont été publiées le 3 mai 2020 par plusieurs un média nigérian Vanguard et repris aussitôt par le site d’information ghanéen Coverghana, qui attribue ces propos au Dr. Dennis A Castro B.
Qu’est-ce que l’hypoxie ?
L’hypoxie, ou hypoxie tissulaire, correspond à un apport insuffisant en oxygène par rapport aux besoins des tissus de l’organisme. Avant de pouvoir être utilisé au sein de l’organisme, l’oxygène est un élément qui doit être apporté par la respiration, transporté au sein de la circulation sanguine puis distribué aux différents tissus.
L’hypoxie peut être due à différentes étapes de ce processus. Elle peut notamment faire référence à une diminution de la quantité d’oxygène apportée aux cellules, une incapacité des tissus à utiliser l’oxygène disponible.
Le port du masque est-il dangereux pour la santé ?
Interrogée lors du point de presse quotidien du gouvernement ivoirien, ce 6 mai 2020, Dr Edith Kouassi, porte-parole du ministère de la santé et de l’hygiène publique, explique que la fabrication des masques obéit à des normes selon qu’ils soient à usage sanitaire ou non, et selon le degré d’exposition au facteur de risque. « Le port de masque est sans danger », rassure-t-elle. « La durée du port continu du masque chez les chirurgiens peut aller jusqu’à 12h voire plus », ajoute-t-elle. Toutefois, déclare Dr Edith Kouassi, « il peut avoir des sensations de vertiges ou d’inconfort quand on n’est pas habitué. Il ne s’agit qu’une simple sensation sans impact réel ». Elle conclut que « les bénéfices qu’on en tire à le porter dans le contexte actuel sont plus important que les éventuels inconforts ou risques qui pourraient survenir ».
Que dit l’OMS sur cette question ?
Contacté par mail afin de savoir si une étude a été faite sur l’efficacité du port de masques, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) rassure de son côté. Docteur Richard Mihigo, Coordonnateur Adjoint de la Riposte Covid-19 du Bureau Régional de l’OMS Afrique à Brazzaville (Congo) soutient que « l’OMS recommande le port du masque dans la riposte contre le Covid-19. Porter le masque de manière correcte est sans danger pour celui qui le porte même pendant un long moment. Il donne le confort. Cela dépend des types de masque en tout cas les masques médicaux et les masques de protection respiratoire N95, FFP2 donnent le confort ». Docteur Richard Mihigo souligne que l’OMS a même publié des directives dans ce sens. Il précise que le port du masque n’est pas une panacée au problème du Covid-19. C’est pourquoi, il recommande d’associer les autres mesures barrières comme l’hygiène des mains et la distanciation sociale.
En effet, dans ses lignes directrices publiées le 29 janvier 2020 puis actualisées le 6 avril 2020, l’organisation mondiale de la santé explique que « le port d’un masque médical est l’une des mesures de prévention qui permettent de limiter la propagation de certaines maladies respiratoires, y compris l’infection due au 2019-nCoV ». Elle précise que « le port d’un masque doit être associé à une bonne hygiène des mains et à d’autres mesures de lutte anti-infectieuse pour éviter la transmission interhumaine du 2019-nCoV ».
Des études scientifiques existent-ils sur le lien entre port du masque et hypoxie ?
Selon Jean-Philippe Santoni, pneumologue et bénévole à la Fondation du Souffle, interrogé par le journal français 20 Minutes, « aucune étude scientifique valable, c’est-à-dire validée par les pairs n’a parlé d’hypoxie liée au port du masque ». « Un masque chirurgical ou en tissu laisse passer l’oxygène. Les équipes soignantes qui portent des FFP2 durant plusieurs heures, s’en seraient rendu compte, s’il y avait un souci à ce niveau-là », poursuit-il.
« Je reçois des patients atteints d’asthme très sévère, et hier encore, les consultations se sont déroulées avec des masques, aucun d’entre eux n’a évoqué ce problème », ajoute auprès du journal, Marc Sapene, pneumologue et président de l’association Asthme et allergies, à Bordeaux.
Ces spécialistes déconseillent de soulever son masque toutes les dix minutes, comme le recommande la publication. « Le Covid-19 est un virus manuporté [qui se transmet par les mains], il ne faut donc surtout pas toucher à la partie absorbante et filtrante. On ne peut toucher qu’aux élastiques. Quand je vois certaines utilisations, comme les personnes qui l’enlèvent et le laissent pendre sur leur cou quelques instants, avec le risque de gouttes de transpiration qui peuvent tomber dessus, j’ai envie de dire que le masque n’est pas un bijou ! », Interpelle Jean-Philippe Santoni. « Il ne faut surtout pas le soulever ni le toucher », atteste Marc Sapene, qui constate lui aussi que le masque est parfois mal utilisé.
En somme, le ministère ivoirien de la santé assure que le port du masque est sans danger. L’organisation mondiale de santé (OMS) ajoute que le port d’un masque médical est l’une des mesures de prévention qui permettent de limiter la propagation du COVID-19. L’OMS recommande que le port du masque soit associé aux autres mesures barrières comme le lavage des mains et la distanciation sociale. Des pneumologues assurent qu’aucune étude scientifique validée ne prouve que l’hypoxie est liée au port du masque.
Mohamed Compaoré