Des publications ont été relayées depuis le 11 juin 2020 notamment sur Facebook, réseau social sur lequel plusieurs comptes ont diffusé des propos attribués au Dr Denis Mukwege, médecin congolais et prix Nobel de la paix 2018. « Le Dr Denis Mukwege vient de démissionner dans l’équipe de la riposte Covid19. Il déclare : je ne peux en aucun cas salir mon Prix Nobel de la paix pour de l’argent, nous avions eu l’ordre de déclarer toute maladie étant corona virus et tous décès de même la chose qui me déplaisait toujours, après plus de 100 échantillons, aucun n’est sorti positif, j’ai une carrière à protéger et je suis congolais du sang, devenir riche par mensonge est un péché devant Dieu, je démissionne », mentionnent ces publications.
Ce qu’il a effectivement déclaré
Le Dr Denis Mukwege a annoncé le 10 juin 2020 sa démission de la Commission multi-sectorielle et de la Commission de la Santé mises en place dans le cadre de la riposte contre la pandémie de Covid-19 dans la province du Sud-Kivu, en République démocratique du Congo (RDC). Il avait été nommé le 30 mars 2020 vice-président de la Commission multi-sectorielle et président de la Commission Santé par le Gouverneur de la province Sud-Kivu.
Dans son communiqué de démission publié sur le site internet de la fondation Panzi, le chirurgien gynécologue de renommée mondiale explique son départ par deux « difficultés majeures » qui ont empêché d’appliquer efficacement la stratégie de riposte mis en place.
Selon lui, l’attente dans sa région d’un délai de deux semaines pour recevoir les résultats des prélèvements envoyés à Kinshasa à cause de l’indisponibilité de tests de dépistage rapide (RT-PCR) de la Covid ainsi que le relâchement des mesures par la population et l’impossibilité de faire respecter les mesures barrières, la porosité des frontières avec le retour massif de milliers de ses compatriotes venant de pays voisins sans avoir été mis en quarantaine, ont fragilisé l’efficacité de la stratégie.
« A ces deux facteurs s’ajoutent des faiblesses organisationnelles et de cohérence entre les différentes équipes responsables de la riposte à la pandémie dans le Sud-Kivu », a justifié Dr Denis Mukwege avant de préciser : « J’ai donc décidé de démissionner de mes fonctions de vice‐président du Comité multi-sectoriel de riposte au coronavirus dans notre province et de président de la Commission Santé, afin de me consacrer entièrement à mes responsabilités médicales et de soigner cet afflux de malades à l’Hôpital de Panzi ».
Le fondateur et directeur médical de l’hôpital Panzi de Bukavu, relève le nombre élevé de cas de Covid dans les hôpitaux de sa région. « A ce jour, au vu de l’afflux de malades affectés par le coronavirus dans les hôpitaux de Bukavu, il semble indubitable que la maladie est présente dans la ville. Nous sommes donc au début d’une courbe exponentielle épidémiologique et nous ne pouvons plus appliquer une stratégie qui serait uniquement préventive », soutient-il.
Ce constat est en contradiction avec des publications relayées sur les réseaux disant que le médecin a décidé de démissionner parce qu’« après plus de 100 échantillons, aucun n’est sorti positif ». En plus, la plupart des médias ayant relayé l’information de la démission du prix Nobel a repris les propos du communiqué publié sur le site internet de sa fondation.
En somme, les termes du communiqué publié par le Dr Denis Mukwege pour expliquer sa démission sont contradictoires à ceux diffusés sur les réseaux sociaux. Le célèbre médecin n’a pas donc tenu les propos qui lui sont attribués.
Anderson Diédri